jeudi 24 décembre 2009



à la demande générale, le cinquième volet de mes aventures poétiques, Jamais De La Vie, est enfin terminé après des mois de lutte acharnée. ainsi, au cas où personne ne m'en offre, je me suis fait mon propre cadeau de noël, histoire d'avoir quelque chose.


encouragé par les chutes de neige, les chutes du niagara et mes chutes de papier, j'ai enfin porté le coup final à cette oeuvre très excitante qui représente le franchissement d'une nouvelle étape dans la maturation de mon écriture, plus puissante et précise, ludique et accessible.


beaucoup de liquides (transpiration, diet coke, canada dry, dr. pepper, chocolat chaud, autres qu'il conviendrait de ne point rendre public) ont été nécessaires pour achever ce livre en bonne et difforme mais le jeu en valait la bretelle, comme dirait l'autre.


son contenu rejoindra sous peu à toulouse les mains expertes de nicomix a.k.a le sérigraphe érudit, pour prendre la forme d'un livre, un beau, un "vrai". nous inaugurons cette fois un nouveau papier recyclé, mais la formule qui a fait ma fortune reste la même sur la forme : une sérigraphie de classe internationale pour la couverture, et un joli papier recyclé gris pour les pages intérieures.


en ce qui concerne le fond, vous trouverez cette même étrange combinaison d'humour et de spleen pour une poésie personnelle barbouillée de jeux de mots, d'expressions familières et de portraits crachés. le propos est ici réparti en quatre chapitres : pièces rapportées, paroles en l'air, fées d'hiver et articles de la mort.


il faut néanmoins s'armer de patience, car vous ne pourrez passer vos commandes qu'à partir de mi-février 2010. ce livre de poche (revolver) de 52 pages pourra alors entrer en votre possession pour le modique déboursement de 8 euros (52,48 francs, 520 anciens francs), ce qui reste tout de même plus abordable qu'une bûche de noël chez shopi, moins le mal de ventre.





quoi qu’on en dise, je suis un citoyen situé pile dans la moyenne générale !

(je devrais bientôt atteindre la mention “lassé bien”)


mon corps respecte le code de la croûte

mon propos est en parfait accord avec la loi de la gravité

mon coeur mélancolisé suit le règlement intérieur à la lettre

mes jambes fonctionnent en pleine conscience de la marche à suivre


j’ai la bouche pleine de protocoles, des mots d’ordre me collent aux dents, je cache même quelques chartes constitutionnelles et autres jurisprudences sous la langue, au cas où


ma vie sexuelle applique strictement la règle de trois

ma vie sociale se déroule selon les conventions usuelles et convenues en vigueur

mes taux d’alcoolémie, de staracadémie et de érémie ne dépassent jamais les limites légales autorisées

ma coiffure est chaque matin replacée en fonction des standards du système métrique


je m’autorégularise, m’autorégulationne et m’autorèglemente

je ferme la porte de chez moi à l’aide d’une clé de douze commandements


j’ai le visage lacéré de décrets, de directives communautaires et de proclamations solennelles, je me laisse cracher des principes fondateurs et des théories générales à la gueule sans broncher, et vas-y que maximes de conduites engluées dans l’oreille gauche et manuels d’instruction dans la narine droite, en veux-tu en voilà mon p’tit père c’est pas ça qui manque, y’a qu’à se pencher pour les ramasser !


je prends connaissance du contrat à purée indéterminée, je signe en bas à droite, je signe en bas à gauche, ce sera comme vous voudrez monsieur le directeur, madame la présidente, je saurai me montrer digne de votre confiance renouvelée, je mets mes initiales, j’appuie bien fort pour que ça traverse le papier buvard et mon esprit, j’ajoute mon “lu et éprouvé”, je garde le double pour mes archives et je rentre enthousiaste dans mon t1 bis repetita avec vue sur parking souterrain !





supermarché love story


je te fixais dans l'blanc des eyes
t'hésitais entre deux melons
dans l'rayon frais de leader price
j'admirais tes beaux reflets blonds

j'avais bien r'péré ton alliance
mais ça m'a pas dissuadé
(la passion se situe à des
kilomètres de la conscience)

j'improvisais un petit raid
pour m'prouver qu'j'en étais capable
et vins te proposer mon aide
pour porter tes sacs recyclables

tu m'as dit : "non merci, monsieur
je sais me débrouiller tout' seule"
niveau séduction, j'ai vu mieux
tu parles d'une gifle dans la gueule !


...

sortie de ce cours


grav'ment blessée d'amour
ma passion tombait, morte
page vierge marie
et je quittais paris
en claquant fort la porte
de fucking clignancourt !

il paraît qu'au printemps
(ou l'été, peu importe)
chaque romance renaît
oui, tu m'en diras tant
et bien, en attendant
je te claque la porte
de clignancourt au nez !

...


lettre de démotivation
(à l'attention de qui de droit)
ou
antipoème


amis, les nuits qu'on érotise
laissons-les donc là où elles sont
ce n'sont pas des trucs qui se disent
mais seul'ment des choses qui se font
la poésie, toujours, s'épuise
à vouloir leur donner des noms
d'aucuns riment et métaphorisent,
vont greffer des sens et des sons
sur ce qui ne sont que des prises
de becs entre moites bisons

circulez, il n'y a rien à boire
ni même à manger pour vos vers
allez chercher sur le trottoir
l'inspiration pour vos bréviaires
car ces orgasmes dans le noir
nés de tendresse mise en lumière
ils échappent tous à vos radars
et sont d'un autre dictionnaire
et puis, ils se font tellm'ent rares
qu'après tout, il vaut mieux se taire !


...

vide-grenier
(10 cents le quatrain)


oh, quand je passe te voir
ah, tu n'es jamais là !
et devant ton miroir
je ne me r'connais pas !

...

j'ai compris qu'entre les pixels
il n'y a pas de monde parallèle
seul'ment des zéros et des uns
des suites de codes qui sont sans fin

...

car mon côté "nomade"
c'est un vice hérité
pour passer d'la pommade
sur ma peau irritée

...

cherchez plus ce qui racle
quand vous bougez le cul
c'est le clou du spectacle !
vous êtes assis dessus !

...

en ce qui me concerne
je suis toujours déçu
sale spleen qui me cerne
qui me laisse sans issue

...


une jeune professeure un peu rock n' roll,
elle est fan de laide z.e.p



quand le terroir fait son strip-tease
on grimace devant sa peau grise
ses poses vulgaires et trop ringardes
poudres avec lesquelles il se farde
et seul le brouillard dans les blés
vient rendre sa touffe humidifiée

quand la campagne fait son show
je ferme les yeux de dégoût
je rêve paris, berlin, rio
le parfum aigre des égoûts
pitié : fourmis, buissons, ruisseaux
ne venez plus au rendez-vous !

quand la nature s'lâche en public
j'ai honte d'être rat des champs
de mes manières un peu rustiques
de cette boue entre mes dents
inutile comme un moustique
mon potentiel d'être méchant

quand le terroir noir se défroque
dans l'aurore moite et poussiéreuse
on voit les ruisseaux qui déstockent
leur flot de tristesse morveuse
à coups de gros plics et de plocs
ils la déversent dans ma gueuse !



mercredi 23 décembre 2009



jingle (bells)


hue, les nouveaux commerçants !
marchez, courez, gros marchands
transpirez, hue, en avant...
hue, les nouveaux commerçants !
la carotte devant vos nez blancs
brav' bêt', vous fait' pas d'mauvais sang
les gens, l'argent, c'est du temps...
j'en sais quequ'chose, et comment
hue, les nouveaux commerçants !



au casting de "la nouvelle star"
je pensais avoir bien géré...
quelle honte en voyant l'autre soir
que j'ai fini dans le bêtisier !

depuis, tout l'monde s'marre dans mon dos
et parfois même, devant ma face
ça m'apprendra à chanter faux
ailleurs que seul devant ma glace

je reste sûr que ma version
de "santiago" est une tuerie
j'assume donc ma subversion
et crie bien fort : fuck le jury !


l a t a r t i n e d u p o è t e :
bris de mots sur pain des pisses

(pour un déjeuner équilibré selon la guilde des nutritionnistes bien avisés)


- mais dites-moi joséphine, j'ai remarqué que les jeunes d'aujourd'hui, ils bronzent pas, c'est incroyable, ils sont tous blancs comme du sperme !

- voyons chère amie, c'est parce qu'ils mettent de l'écran total !

: : :

(blague carambar trouvée dans la poche d'une minijupe avec un motif "camouflage militaire" de bon goût à emmaüs)

(échange intercepté sur le siège d'un petit train touristique bondé entre le centre commercial et la décharge municipale)

(dialogue extrait d'un rêve enregistré par le serveur fantasmatique central la veille de mon douzième anniversaire)

(poème gribouillé sur le dos d'un chinois dans la queue du "space mountain" de disneyland-châteauroux)



mardi 22 décembre 2009


sevrage



croyant bien interpréter tes signes

je m’approchais de tes lèvres...

ma joue claqua contre ta main


j’avais faux sur toute la ligne

de métro 10 sèvres -

babylone brûlait sur papier pain



in jamais de la vie, décembre 2009.




ballade du rond-point



entre angoisse du futur

et nostalgie foetale

je conduis ma voiture

écoutant du métal


souvent, je fais cinq fois

le tour de ce rond-point

car je connais pas, moi...

je ne suis pas du coin


à gauche ou bien à droite

c’est du pareil au même

je finis toujours en boîte

terrassé par la flemme


souvent, je fais dix fois

le tour de ce rond-point

car tout se ressemble, quoi...

(enfin bon, plus ou moins)


à droite ou bien à gauche

au final, peu importe

car le spleen me fauche

et me cloue sur sa porte


si j’prenais ce rond-point

en sens inverse, pour voir

je n’irais pas plus loin...

point final de l’histoire


lundi 21 décembre 2009


c'est inscrit dans mes gênes



je trébuche au coeur de ces foules indigènes

avons-nous vraiment quelque chose en commun ?

je crains que ce ne soit inscrit dans mes gênes

je ne peux pas cacher que j’ai peur d’être humain


cette peur, bien souvent, me prend l’volant des mains

pour m'emmener très loin, ailleurs, je ne sais où

et j’ai beau refuser d’emprunter ses chemins

je les suis lentement, tristement, malgré tout



dimanche 20 décembre 2009


bras dessus, bras de saouls



pour ceux aux regards un peu mous

même la mort est une blague

ils vont bras dessus, bras de saouls

sur les parkings ils zigzaguent


et vas-y qu’ils braillent “aïe love youuu”

les ventres pleins d’apéricubes

ils vont bras déçus, bras dessous

sur les trottoirs ils titubent


recherchant le chemin d’l’hôtel

(chambre payée par l’entreprise)

bien arrosés de jack daniel’s

dans l’espoir de noyer leur crise


puis le matin, faut voir leurs faces

quand ils étouffent dans leur vomis

rêvant de p’loter des chaudasses

d’enfin tester la sodomie


ils se réveillent tous en sursaut :

“la réunion en salle de conf’ !”

ils s’habillent vite et courent à donf’

représenter connard & co.




in jamais de la vie, décembre 2009.




vendredi 18 décembre 2009


"c'est un lieu commun, hélas, mais la poésie ne se vend pas, ne s'est jamais vendue, ne se vendra jamais, ne se lit pas. elle n'est lue que par quelques maniaques, dont nous sommes ! ou par des universitaires qui, la plupart du temps, la lisent mal, ne savent pas la lire !"

léo ferré


jeudi 10 décembre 2009


vous pouvez compter sur vos fidèles machines

pour corriger vos déficiences

pour préparer vos pics-nics à la décharge

pour vous tenir la main aux toilettes

pour vous aider à traverser l’autoroute

pour détacher vos lèvres cousues de fil blanc

pour vous faire une coupe au bol de frosties

pour opérer vos chiens de famille

pour jouer au monopoly pocket

pour calculer le temps qu’il vous reste à mourir

pour connaître les horaires du cinéma muet

pour nettoyer vos murs qui ont des oreilles

pour nettoyer vos oreilles qui ont des murs



mardi 8 décembre 2009


comme si on y était



j’enfile mon casque en forme de crâne, j’attrape un serpent pour ceinturer mon jogging, fais un noeud à son cou et voilà, comme si on y était, dans un rêve d’écrivain, avec des cochons qui s’font la malle en tracteur et se font arrêter pour conduite en état d’ivresse : “je vous promets, je n’ai rien bu monsieur, puisque j’vous dis que c’est la liberté !”, et la seconde d’après, comme si on y était, dans un rêve d’instituteur, les barbes à papa sont des sticks de nuages et les cotons-tiges des bâtons de majorettes pour les nains, et d’un coup sans prévenir hop dans un rêve d’imprimeur, comme si on y était, les statues des parcs publics donnent de la voix en notre absence, les feuilles des chênes se cassent la gueule des branches et se posent sur nos langues et doigts de pieds comme un salarié pose ses congés, et sans crier garde, on s’y retrouve comme si on y était, dans le rêve d’un barman, où les candidats à la trésidentielle ne répondent que “bonne question” à ce qu’on leur demande et se curent le nez avec leurs stylos bic quand les caméras sont off.



vendredi 4 décembre 2009


chose promise, chômedu



comme la boîte d’intérim

inonde pas l’répondeur

en attendant, je rime

écrasé par les heures


le kebab sauce blanche

ma bouche en connait le goût

triste plat du dimanche

avec la corde au cou


comme la boîte d’intérim

ne donne plus de nouvelles

j’éjacule ma déprime

sur des vieux marc dorcel


je me dis que c’est bien

et jalouse le zèle

de cet étrange indien

qui garnit mon falafel


in jamais de la vie, décembre 2009.



mercredi 2 décembre 2009


deal aime



panier ou caddie ?

la montagne ou la mer ?

sac à dos ou à main ?

à pied ou en bus ?

avec elle ou bien sans ?

l’usine ou la mine ?

l’amour ou l’ennui ?

ciné ou dvd ?

fourchette ou cuillière ?

une douche ou un bain ?

maintenant ou demain ?

bureau ou école ?

frites ou potatoes ?

toujours ou jamais ?

ordi ou télé ?

ici ou ailleurs ?


(réponses au dos du paquet)




dépiteur panne



sous un chêne rachitique

que la grêle décharne

j’entre en état critique

dans un bled du tarn


ma voiture au garage

sncf en grève

coincé dans les parages

en recherche de rêves


plein d’haribos réglisse

qui me crispent le bide

j’atteinds l’hôtel ibis

c’est un refuge morbide


je réserve un lit double

ça étonne l’hôtelier

un supplément de roubles

car j’aime dormir en biais


dans cet hôtel ibis

je mate “les enfoirés”

un bout de cannabis

pour finir la soirée


l’néon du plafond buzze

un clocher miaule minuit

c’est ma tombe qui se creuse

et tout ce qui sang suie


dans cet hôtel ibis

j’ai un fond de bouteille

ô pastis, mon complice

pour trouver le sommeil


pieds nus sur la moquette

nu sous ma robe de chambre

j’bouffe salade de roquette

dans sa flaque de gingembre


dans cet hôtel ibis

la main en bol de chips

je tripote mon pénis

d’vant des vidéoclips


mon portable est cassé

internet est trop lent

je peux donc m’effacer

mourir aux yeux des gens


je suis perdu, en rade

dans une france profonde

profonde comme un puits crade

le trou du pus du monde



in jamais de la vie, décembre 2009.




fées d'hiver / états dames



dans ton jardin définitif

tu arrachais les mauvaises herbes

tandis que j’arrachais mes tifs

à décider du meilleur verbe


sur ton piano décoratif

on n’entendait que frère jacques

je voulais que tu joues au pif

mais tu avais toujours le trac


je rêvais sans cesse de tes doigts

le matin, j’en faisais l’inventaire

d’être si proche de toi

bien peu alors s’en vantèrent


de chambres en rues, de gares en ports

mon amour : qu’est-ce qu’il te prend ?

le changement n’est que dans le décor

je mets ton corps en fond d’écran


j’essuie mon sang avec ta soie

j’essuie ma bouche dans tes cheveux

je sèche ma salive dans tes doigts

tu voix mon amour que je peux !


on se fait du bouche à bouche

pour nous rendre un état d’conscience

ça marche pas, mais tabernouche

ça fait du bien dans tous les sens !



mardi 1 décembre 2009


poème inaugural



le moins qu’on puisse dire

c’est plus qu’à l’accoutumée

ce s’rait se répéter de dire :

“on est tous foutus”, mais


c’est toujours bon à entendre

comme dirait ma mémé

(si tenté que les cendres,

ça pouvait nous parler)


le moins qu’on puisse dire

c’est bien plus qu’il n’info

tous voudraient nous servir

du fantasme ou du faux


alors que tout c’qu’on veut

c’est du vrai, du pur jus

ouais mec, et pas qu’un peu

que ça déborde du cul !




sur la plage arrière



bourdon bruyant des pales

rouillées du ventilo

dans l’air salé et sale

de notre bungalow


grincement gras des lattes

du parquet de terrasse

sous la pression des pattes

de notre chien de race


froufrou affreux des feuilles

du magazine de jeux

délaissé sur le seuil

dans le vent sablonneux


cet exil estival

de bord de plage me gonfle

irritée par le râle

de mon mari qui ronfle

j’appréhende les bouchons

pour quitter mimizan

en écoutant souchon

(le même cd depuis dix ans)


in pas le moins du monde, octobre 2009.